Bruits et odeurs de la campagne protégés par la loi

Coq et poule à la campagne
Le chant du coq, le bruit des cigales ou encore l'odeur du fumier : face aux plaintes excessives, une loi va définir le patrimoine sensoriel de la campagne pour la protéger.

Un bruit de tracteur au loin, un coq qui chante au lever du soleil, l’odeur du fumier qui se répand près d’une exploitation agricole : bref, la campagne.

L’Assemblée nationale a voté le 30 janvier, à l’unanimité, une proposition de loi visant à protéger les bruits et odeurs de la campagne, en les inscrivant dans le droit français.

 

Le Patrimoine sensoriel de la campagne

Afin de protéger ce patrimoine de nos campagnes, le député Pierre Morel-A-L’Huisser a porté un texte en première lecture UDI-Agir, soutenu de tous côtés, notamment par LREM et les députés Sandrine Mörch et Pascal Lavergne. Ceux-ci ont salué « une belle victoire » suite au vote.

Ainsi le chant du coq, le bruit des cigales ou de canards, tout comme les effluves de fumier et bouses de vaches font désormais partie du code de l’environnement.
Enfin un cadre juridique clair pour protéger la vie à la campagne.

Le texte prévoit un inventaire par terroirs, qui pourra donc évoluer pour protéger localement les spécificités des régions et des campagnes. Cet inventaire contiendra des « bruits et odeurs caractérisantes qu’on veut protéger au nom du patrimoine sensoriel », selon son auteur.

Cette nouvelle protection juridique devrait, comme l’espèrent les députés, dissuader les dépôts de plaintes et procédures pour nuisances.
Les avocats pourront prévenir leurs clients que ces bruits et odeurs sont désormais protégés et font partie du patrimoine, et par conséquent qu’un procès aurait de fortes chances d’être perdu.

Le député LREM de Gironde, Pascal Lavergne qui soutient ce texte, est d’ailleurs bien au fait de ces plaintes, ayant lui-même fait l’objet de telles poursuites entre 2010 et 2014 après avoir racheté une exploitation.

« Sur nos petits chemins ruraux, il y a des bouses, ça fait partie intégrante de la vie rurale. Et les gens le découvrent : +Mais ça sent !+. Eh oui ! », lance Pierre Morel-A-L’Huissier, regrettant un « conflit de sociologie ».

 

« Nos vaches, nos poulets et nos cochons pourront continuer à animer nos campagnes ! », a aussi lancé mardi dans l’hémicycle, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye, en réponse à une question de Pierre Morel-A-L’Huissier.

canards blancs dans un élevage

 

Les bruits et troubles de voisinage

Sont considérés comme une nuisance les bruits de voisinage qui sont anormaux par leur caractère répétitif, leur niveau sonore ou leur nature.

Au quotidien

Dans la vie quotidienne et même en pleine journée, des bruits et odeurs peuvent être considérés comme des nuisances s’ils perturbent la tranquillité de vie.
Un voisin qui insonorise tout le quartier avec sa musique à fond, une installation qui émet des odeurs nauséabondes…

La nuit

Bien connu malheureusement de beaucoup de citadins, le tapage nocturne est plus particulier : ici pas besoin de prouver l’anormalité de la situation.
Tout bruit qui cause un trouble et dont l’auteur a conscience, sans y remédier, est une nuisance (cris, musique à plein volume…).

Seulement, il y a des choses tout à fait normales dans un environnement rural.

 

Aberrations de la part de citadins et vacanciers

Ces dernières années, des histoires totalement ubuesques faisaient régulièrement le buzz, perturbant la tranquillité de certaines petites communes, exaspérant les élus locaux et générant dans le même temps des vagues de soutiens, avec pétitions en lignes.

 

Décaler l’horaire de la cloche d’une église

En 2018, une habitante de Foix (Ariège) considérait que les cloches de l’abbatiale Saint-Volusien qui sonnaient la nuit étaient source de tapage nocturne.

En 2019, des touristes parisiens en vacances en Lozère demandent à décaler la sonnerie de la cloche, trouvant celle de 7h trop matinale à leur goût.

Le coq Maurice sur l’île d’Oléron

Une affaire qui avait fait beaucoup de bruit : le coq Maurice sur l’île d’Oléron.
Le pauvre gallinacé de Mme Fesseau était menacé par des voisins. Ceux-ci, qui n’étaient d’ailleurs là que dans leur résidence de vacance et non des habitants du village tout l’année, estimaient que le chant du coq était une nuisance sonore.
Heureusement pour le volatile, le tribunal correctionnel de Rochefort avait alors statué en faveur du coq Maurice.

 

Des cas qui se multipliaient

Malheureusement, ce type de plainte qui a priori pourrait faire sourire tellement elles paraissent… aberrantes… tendait à se multiplier et à prendre des proportions alarmantes.

Plainte contre le chant des cigales, plainte contre le bruit des cloches de vaches dans une pâture, plainte contre le bruit de caquètements dans les landes à proximité d’un élevage de canards des landes…

Et parfois, les tribunaux rendaient des décisions contre la nature.
Un couple a ainsi dû reboucher une marre, les voisins se plaignant des chants des grenouilles.
Une exploitation a dû investir en urgence et installer des diffuseurs de parfums pour masquer l’odeur de ses canards, sous peine de sanctions financières.

Des situations pesantes pour les habitants, pour les professionnels, pour les élus, et mettant en danger la biodiversité et la protection de la campagne telle que nous la connaissons.

une cigale sur un arbre

 

Vivre à la campagne, en respectant la campagne

Cette loi devenait donc essentielle, obligatoire, pour mettre fin à cet engouement pour les plaintes pour nuisances sonores et olfactives à la campagne.

Les citadins qui veulent quitter la ville, que ce soit plusieurs semaines ou mois par an, ou pour vivre définitivement à la campagne, doivent accepter cet environnement.
Sinon : bétonisons donc toutes la pâtures, construisons des autoroutes sous les fenêtres pour respirer à pleins poumons la si douce odeur de pot d’échappement et enfermons les animaux dans des immenses hangars insonorisés qui diffusent des parfums de framboise ! Remplaçons les cours d’eau par des caniveaux débordant de plastiques, mégots et excréments de chiens.

Un peu de sérieux, de grâce…

La nature est agréable à observer, entendre, sentir, toucher.
Les animaux et bruits de la ruralité font tout le charme des petits villages, des campagnes, du terroir.
Que seraient les petits hameaux sans le chant d’un coq au lever du soleil ? Que seraient la Provence et le sud de la France sans le bruit des cigales ? Que seraient les nuits campagnardes sans le bruit de chouettes et de grillons ? Que serait le Printemps sans l’éclosion de la vie, le vrombissement des insectes, les chants des oiseaux, les troupeaux dans les prés… ? Ce ne serait pas la vie.

Une vache qui passe dans une pâture et lâche des bouses, c’est normal.
Un agneau qui bêle pour appeler sa mère, c’est normal. Un agriculteur qui passe la moissonneuse-batteuse à 4h du matin car il travaille énormément, en fonction de la météo et des récoltes… c’est normal.

un tracteur dans un champ à la campagne

Le rythme de vie en zone rurale n’est pas le même qu’à Paris.

La malheureuse nécessité de devoir publier une loi pour cela peut (devrait !) aussi soulever des questions sur notre société, et l’avenir que l’on dessine pour les générations futures.
Pourquoi tant de citadins quittent la ville pour le calme de la campagne, aspirent à une vie moins stressante, à respirer un air plus sain et moins pollué, à favoriser les élevages et exploitations plus respectueux de la nature et des animaux… tout en refusant ce cadre de vie campagnard et pire, en voulant imposer leurs codes et habitudes citadines ?

Aurait-il fallu éradiquer la faune et la flore, pour que celles et ceux qui veulent se mettre « au vert » aseptisent les campagnes et ne portent plus plainte contre le moindre bruit d’origine naturel ?

Voir que dans d’affaires défrayaient la chronique était devenu une aberration sans nom.

A l’heure où toujours plus de personnes prennent enfin conscience de la nécessité de préserver la faune et la flore, de favoriser les petites exploitations et de préserver la nature et l’environnement de façon globale, cette loi est plus que la bienvenue.

Saluons donc cette décision de l’Assemblée nationale.

 

Crédit photos : pixabay

 

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8 réflexions sur “Bruits et odeurs de la campagne protégés par la loi”

  1. Il est quand même anormal que à cause de certains abrutis une telle loi doive être prise mais au moins les bobos pisse froid savent à quoi sans tenir.Bravo les législateurs.

  2. Moi j’ai un tas de fumier à 17 mètre de ma maison principale , et il fait 20 m de long sur 4 m de large.
    La aussi il ne faudra plus rien dire, il n’y aura plus de distance à respecter vis à vis des habitations ?

  3. Bonjour René,
    Non, il y a tout de même des règles sanitaires et de vie en communauté à respecter.
    L’idée finale étant de respecter à la fois la campagne, et les gens qui y habitent.

    Autant les citadins qui débarquent à la campagne et exigent de faire taire un coq ou faire disparaître les vaches des champs feraient mieux de retourner vite fait s’entasser à côté du périphérique ;
    Autant un éleveur ne peut pas non plus déverser son purin dans votre jardin 😉

    Concernant le stockage du fumier, il y a des règles précises qui dépendent en réalité du type de matière et du traitement qui sera fait ainsi que le délai : enfouissement en moins de 24h ? … (les règles évoluent et nous ne sommes pas forcément à jour).
    Mais… en règle générale, il semble que la distance pour le stockage du fumier proche d’une habitation est plutôt de 100m.

    Le mieux est ici d’aller consulter votre mairie et d’évoquer le cas avec eux. Le maire est en effet responsable du respect de certaines consignes sur sa commune.
    Logiquement, une discussion à l’amiable devrait résoudre votre problème 🙂

  4. on vient d’acheter une maison dans un village en janvier, et notre voisin a fait dans sa cour un aménagement pour poule coq et canard néanmoins sa basse cour jacasse jour et nuit on est a bout a t il le droit si près ???

    1. Bonjour,
      Vous semblez décrire plusieurs choses ici.
      Le fait d’être à la campagne et qu’un voisin ait des poules, coqs, canards : ça, votre voisin en a parfaitement le droit. Et au vu de cette récente loi, si vous tentez une action en justice vous y laisseriez des plumes (si vous nous permettez ce trait d’humour 😉 ).

      La proximité : ça… c’est autre chose.
      Est-ce que la basse-cour est très, très proche de votre maison ? Car outre le bruit, et même en étant défenseurs des animaux et de la campagne… eh bien oui, canards et poules peuvent causer d’autres désagréments (présence de rats…).
      Là, nous ne saurions vous répondre n’étant pas juristes ni avocats.

      La nuisance la nuit : c’est encore autre chose !
      Vous avez normalement le droit à pouvoir dormir tranquillement la nuit.
      Malheureusement, encore une fois, nous ne sommes pas juristes.

      Si ce n’est déjà fait, tentez l’approche à l’amiable. Puis essayez de voir avec la mairie, comme rôle de médiateur. Tentez toujours une approche courtoise : tout le monde sera plus enclin à mettre de l’eau dans son vin.
      Désolés de ne pouvoir vous aider davantage, mais ces questions sont toujours très particulières et nécessitent l’avis d’un professionnel.

  5. bonjour le problème inverse n est pas souvent évoqué personne s installant dans un village au milieu de celui ci venant installer un poulailler avec de fortes nuisances sonores a 50 mètres de chez moi qui suit installe depuis 1977 .

    1. Bonjour,
      Comme nous le disions dans un message précédent, il y a évidemment des cas particuliers.
      Et si vivre à la campagne est naturellement (et heureusement) synonyme de toute la vie qui va avec : oiseaux, chevreuils, bruits de canards, de poules, d’ânes… Odeurs de purin…
      Il y a des limites à tout. Le mieux est dans un premier temps d’en discuter localement : voisin, mairie…

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