Deux ans !
Il aura fallu deux ans de navette, discussions, échanges, modifications… pour arriver à ce que les institutions accouchent de cette loi.
Adoptée définitivement à l’Assemblée Nationale lors d’un vote du 15 juillet et promulguée, inscrite au Journal Officiel le samedi 25 juillet, la nouvelle loi durcit les règles du démarchage téléphonique et renforce la lutte contre le harcèlement.
Démarchage téléphonique abusif : un fléau
Si la définition du démarchage téléphonique abusif et les règles qui cadrent les bonnes pratiques ne datent pas d’hier, les abus sont massifs.
Le site officiel Service-public.fr résume d’ailleurs très bien cela :
« On parle de démarchage téléphonique abusif lorsque vous recevez des appels téléphoniques commerciaux non sollicités. Vous n’avez pas donné votre accord pour ces appels et vous n’avez pas donné directement vos coordonnées à l’entreprise. »
C’est donc clair comme de l’eau de roche. Sur le papier tout du moins.
Tous les groupes politiques à l’Assemblée Nationale ont bien été forcés de concéder que les appels téléphoniques non-sollicités et répétitifs constituaient un « fléau » qui « empoisonne la vie » des Français.
Malgré les communications fréquentes sur le sujet depuis des années, le renforcement des lois, la mise en place du service Bloctel pour refuser tout appel commercial non-sollicité… les plaintes se multipliaient et régulièrement une nouvelle pétition contre le démarchage téléphonique voyait le jour.
Depuis l’été 2019, les opérateurs téléphoniques ont même l’obligation de bloquer tous les appels qui utilisent un numéro en France (01 à 05 pour les numéros géographiques, 09 pour les autres), alors que l’appel provient en réalité d’un autre pays.
Par exemple : un centre d’appel au Maroc ou en Inde, qui démarche en France avec un numéro commençant par 01 pour faire croire au prospect qu’il s’agit d’une société avec des bureaux en région parisienne.
Rénovation énergétique, le démarchage interdit
C’était très certainement la cause la plus fréquente ces derniers temps d’appels non-sollicités et répétitifs : la rénovation énergétique.
Un enfer pour certains particuliers qui se sentaient bien souvent démunis et abandonnés face à des nuées d’entreprises peu scrupuleuses aux pratiques honteuses.
Car en plus de la gêne incessante causée par tous ces appels, s’ajoutait dans ce secteur d’activité une recrudescence d’escroqueries et d’arnaques à l’isolation à 1€, bien que le dispositif soit à l’origine légal, officiel et même nécessaire.
Les professionnels (sérieux) du secteurs demandaient eux-mêmes à totalement stopper ces appels.
C’est désormais chose faite. Excepté si vous avez déjà un contrat ou une réelle discussion engagée avec une entreprise (devis, rendez-vous…), le démarchage téléphonique est dorénavant interdit pour les travaux d’isolation, le remplacement d’une chaudière ou encore la pose de panneaux photovoltaïques.
Obligation de vérifier le fichier Bloctel
Pendant des années, les entreprises qui réalisaient des campagnes de prospection téléphoniques étaient incitées à vérifier cette liste anti-démarchage, mais avec de nombreuses dérogations et exceptions.
Là aussi, la nouvelle loi rectifie le tire : tout professionnel qui souhaite réaliser une campagne de prospection téléphonique doit s’assurer de la conformité de ses fichiers, et exclure toute personne inscrite sur Bloctel.
Nullité des contrats
La nouvelle loi renforce aussi la protection du consommateur face aux abus.
Si vous êtes inscrit sur Bloctel (attention, comptez bien 30 jours pour que le fichier soit complètement mis à jour et pris en compte), qu’une entreprise vous démarche par téléphone et que vous concluez un contrat (car les démarcheurs peuvent se montrer extrêmement persuasifs), le nouveau cadre juridique prévoit « la nullité des contrats conclus sur la base d’un démarchage téléphonique pour les consommateurs inscrits sur la liste d’opposition à celui-ci », (source la DGCCRF).
Vous pourrez donc faire annuler tout contrat et prestation issus d’un appel non-sollicité.
Amendes administratives relevées
Enfin, la seule et vraie manière de lutter contre ce fléau : frapper là où ça fait mal, autrement dit au porte-monnaie.
Alors que les précédentes amendes administratives étaient de 3 000€ pour les personnes physiques et 15 000€ pour les personnes morales, la nouvelle loi relève drastiquement les responsables d’appels frauduleux avec des amendes à 75 000€ pour les personnes physiques, et 375 000€ pour les sociétés.
Encore faut-il attraper les auteurs de ces démarchages abusifs, et la DGCCRF (service de lutte contre la fraude) risque de manquer de moyens. Alors consommateurs, si vous continuez à être victimes d’appels frauduleux, déposez des réclamations sur Bloctel pour alerter l’administration française et permettre à la DGCCRF de faire son travail.
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